Les insuffisances d’une analyse purement historique des droits des peuples autochtones

RÉSUMÉ

 

La lecture que les tribunaux font du passé est destinée à trouver des solutions aux problèmes actuels, en écartant de l’analyse les éléments qui sont incompatibles avec les principes fondamentaux du système juridique canadien. Ainsi, au xviie et au xviiie siècles, la violation d’un traité est sanctionnée par le recours aux armes ou par l’interruption des échanges entre les partenaires. Seul un processus de négociation permet aux Autochtones de présenter leurs doléances et d’obtenir satisfaction. À cette époque, ils peuvent pratiquer la chasse et la pêche librement. Puis, lorsque le rapport de force tourne à l’avantage de l’État, celui-ci impose unilatéralement son autorité, notamment en réglementant ces activités. Depuis 1982, les droits ancestraux ou issus de traité sont protégés par la Constitution. Ils ont préséance sur la législation, dans les limites fixées par les tribunaux. Le contexte a donc changé du tout au tout. C’est pourquoi les décisions rendues par les juges ont peu à voir avec les préoccupations contemporaines des parties au traité. Mais ce décalage est inhérent à l’analyse juridique : par la force des choses, une convention ordinaire ou une disposition législative peuvent donner lieu à des diffi- cultés auxquelles personne n’avait songé. Les tribunaux sont alors laissés à eux-mêmes et doivent façonner une solution, en s’inspirant des attentes des cocontractants ou du législateur. Ils ne procèdent pas autre- ment en matière de droits autochtones, même s’il existe un hiatus beau- coup plus considérable entre le passé et le présent. C’est sans doute ce qui explique l’incompréhension voire l’agressivité que manifestent par- fois certains historiens à l’égard de leurs décisions. 

Ce contenu a été mis à jour le 12/05/2016 à 16 h 36 min.